neomie ferre

Dr. Noémie Ferré, en quoi consiste le projet “As du Cœur MultiCentrique” ?

D’abord il faut le restituer dans son contexte : il s’inscrit dans le cadre de l’article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale 2018 qui permet des expérimentations innovantes dont l’objectif est de concourir à l’amélioration de la prise en charge des patients, de l’efficience du système de santé et de l’accès aux soins.

Le projet vise précisément à expérimenter la prise en charge, par l’assurance maladie, d’un programme d’activité physique adaptée (APA) chez des patients sortant de réadaptation cardiovasculaire afin de les accompagner vers une pratique durable et régulière.
Suite à son autorisation le 27 mai 2020, As du Coeur MultiCentrique va bénéficier d’un budget spécifique pour son déploiement.

Il doit répondre à 2 questions :

  • ce projet est-il faisable et reproductible à plus grande échelle ?
  • quel est l’impact de ce projet pour le patient (bénéfices sur sa santé globale) et pour la société (étude des dépenses de santé évitées grâce au programme) ?

Cette expérimentation multicentrique est la suite de l’étude scientifique menée en 2015 par une équipe multidisciplinaire qui a démontré sur un échantillon de 45 personnes atteintes de maladies cardio-vasculaires bénéficiant d’un programme d’APA une réduction de leur dépenses de santé de 30% par rapport au groupe contrôle (réf. de la publication dans BMC cardiovascular

 

Quelle est la “vision long terme” derrière cette initiative innovante ?

L’objectif à long terme est de rendre la pratique de l’activité physique adaptée accessible à tous, et en particulier aux personnes atteintes d’une ou plusieurs maladies chroniques.

L’activité physique doit faire partie du traitement de la plupart des maladies chroniques comme les affections cardiovasculaires, le diabète ou la dépression : les scientifiques sont unanimes sur le sujet !

Cependant, malades ou pas, aujourd’hui en France nous ne sommes pas assez nombreux à pratiquer une activité physique régulière : 1 adulte sur 3 et, plus inquiétant encore, 4 enfants sur 5 ont un niveau d’activité physique insuffisant. Il est donc urgent de redonner aux français le plaisir du mouvement et de faciliter l’accès à cette activité physique. Mais il est également essentiel de permettre aux personnes atteintes d’affection longue durée de pouvoir d’accéder à l’activité physique thérapeutique, ne pas y accéder représente une véritable perte de chance pour le patient.

 

Et comment ça se passe pour un patient qui souhaite participer à l’expérimentation ?

Dès 2021 (la date précise sera fixée en fonction de la situation sanitaire), tout patient volontaire qui aura été pris en charge dans un des 10 centres de réadaptation participant à l’expérimentation et résidant à proximité d’une structure APA sélectionnée pourra bénéficier du programme, sous réserve qu’il ne présente pas de contre-indication à la pratique de l’activité physique bien sûr.

Les 10 centres se trouvent dans les 5 régions suivantes :

  • La région Sud – Provence Alpes Côte d’Azur
    Maison du Mineur – Vence (06), Hôpital privé Arnault Tzanck – Mougins (06), Hôpital Privé Gériatrique Les Sources – Nice (06), Hôpital Privé Clairval – Marseille (13), Hôpital Léon Bérard – Hyères (83)
  • La région Bretagne
    Clinique Saint Yves – Rennes (35)
  • La région Auvergne – Rhône Alpes
    Clinique médicale de Cardio-pneumologie – Durtol (63), Centre de réadaptation cardiorespiratoire de la Loire – Saint Priest en Jarez (42)
  • La région Centre – Val de Loire
    Centre de réadaptation et de prévention cardiovasculaire Bois Gibert – Ballan-Miré (37)
  • La région Occitanie
    Clinique de Saint Orens – Saint Orens de Gameville (31)

Ce programme d’APA à but thérapeutique durera 5 mois et comporte 2 volets :

  • Un volet centré sur la pratique : 2 séances d’activité physique adaptée par semaine (incluant travail cardiovasculaire et renforcement musculaire) encadrées par un intervenant en APA formé.
  • Un volet centré sur l’accompagnement vers une pratique durable qui consiste en 6 ateliers éducatifs (individuels et collectifs) et propose au patient des outils visant à développer sa motivation dans la durée.

 

Combien de participants allez-vous accueillir au total et qui va les prendre en main ?

Nous pourrons accueillir 1200 patients au total, issus d’un des 10 établissements de Soins de Suite et de Réadaptation (SSR).
Les structures d’APA qui accueilleront les patients pourront être des associations (clubs sportifs, ou autres), des maisons sport santé, des structures privées, etc. Le choix de celles-ci est réalisé de façon collégiale avec les SSR, les ARS et les DRDJSCS et s’appuie sur un cahier des charges précis. Ce choix tient également compte d’un certain nombre de contraintes (géographiques et financières notamment). Il est prévu d’en retenir une trentaine.

 

Qui garantit le déploiement de ce projet et comment le financez-vous ?

C’est l’association Azur Sport Santé, reconnue depuis 5 ans par l’ARS PACA comme centre de ressources et d’expertise du sport santé, qui porte ce projet d’expérimentation.

Elle s’appuie sur 2 instances pour prendre les décisions et suivre le projet :

  • Un comité de pilotage composé d’experts, représentants institutionnels (Ministères, Assurance Maladie), professionnels de la santé (dont les Pr Carré et Pr Duclos) et professionnels de l’activité physique adaptée.
  • Un comité territorial par région composé des acteurs locaux intervenant dans le champ de l’APA (a minima ARS, DRDJSCS et SSR).

L’évaluateur (externe) du projet analysera donc sa faisabilité, son efficacité et sa reproductibilité. Ces éléments conditionneront une éventuelle généralisation du dispositif. Les résultats de l’expérimentation, autorisée pour 3 ans, constitueront un véritable enjeu pour l’avenir de la prise en charge de l’APA à but thérapeutique des patients en ALD.

 

Références bibliographiques
1. ANSES. Actualisation des repères du PNNS – Révisions des repères relatifs à l’activité physique et à la sédentarité. 2016.
2. ANSES. AVIS et RAPPORT de l’Anses sur la troisième étude individuelle nationale des consommations alimentaires – INCA 3. 2017.
3. INSERM. Activité physique : Prévention et traitement des maladies chroniques – synthèse. 2019.