Dans le cadre de ses missions d’identification des enjeux du secteur du sport santé, Azur Sport Santé a travaillé à la mise en place de trois commissions dont l’une d’elles est intitulée “modélisation économique du sport santé”.

Après plusieurs rencontres, voici le premier rapport de cette commission :

1- Intérêts sociaux-sanitaires et économiques des programmes sport santé : en quelques chiffres

En France(2) :

  • 10,1 % des personnes assurées au régime général sont en Affection de Longue durée (ALD), soit 16,6% de la population.
  • On estime à 60 % les dépenses de santé liées aux ALD soit environ 90 milliards d’euros par an.
  • L’incidence et la prévalence des ALD est de plus en plus importante à partir de 40 ans.

Dans les Alpes-Maritimes(4) :

  • 154 221 personnes assurées au régime général sont en ALD, soit 14,2 % de la population du territoire.
  • 310 000 habitants ont plus de 60 ans, soit 28 % de la population des Alpes-Maritimes.
  • Le nombre annuel moyen de nouvelles admissions en ALD est de 29 096, soit 2,7 % de la population du territoire.

Dans le Var :

  • 142 866 personnes assurées au régime général sont en ALD, soit 13,9 % de la population du territoire.
  • 309 000 habitants ont plus de 60 ans, soit 16 % de la population du territoire, soit 30 % de la population Varoise.
  • Le nombre annuel moyen de nouvelles admissions en ALD est de 29 641, soit 2,9 % de la population du territoire.

La prévalence de ces maladies chroniques a des conséquences socio-sanitaires et économiques importantes. Or il existe désormais un consensus des sociétés savantes et des instances publiques sur les effets bénéfiques d’une pratique d’activité physique adaptée régulière et durable en prévention primaire, secondaire et tertiaire(5). Investir dans l’activité physique comme « outil de santé », se révèle ainsi une stratégie efficiente en prévention des maladies chroniques et en économie de la santé. En effet selon un rapport du Conseil National des Activités Physiques et Sportives (CNAPS)6, une personne « active » par rapport à une personne « sédentaire » permet d’économiser au minimum 250 € par an sur les dépenses de santé.

Des économies peuvent être également faites en thérapeutique non médicamenteuse. Récemment les premiers résultats de l’étude scientifique « AS du Cœur » confirment cette tendance(7). L’intervention « AS du Cœur » s’est révélée efficiente pour améliorer la qualité de vie et réduire la consommation de santé chez 38 patients touchés par une maladie cardiovasculaire. Durant l’année précédant les 24 semaines d’intervention en APA, la consommation moyenne de soins de santé s’élevait à 4 097 € par patient. Tandis que l’année qui a suivi l’intervention, chaque patient a consommé en moyenne 2 877 € de soins de santé, soit environ 30 % de moins que la période précédente. La consommation de soins de santé est restée stable dans le groupe témoin (4 087 € versus 4 180 €). Celui-ci était composé de 1 891 personnes également touchées par une maladie cardiovasculaire.

2- La structuration de l’offre sur le territoire PACA

Selon le décret n°2016-1990 du 30 décembre 2016 de l’article L. 1172 du code de la santé publique(8), on entend par activité physique adaptée, une pratique dans un contexte quotidien, de loisir, de sport ou d’exercices programmés, basée sur les aptitudes et les motivations de personnes ayant des besoins spécifiques qui les empêchent de pratiquer en milieu ordinaire. Cette pratique est adaptée à «la pathologie, aux capacités physiques et au risque médical du patient » et a pour but de « permettre à une personne d’adopter un mode de vie physiquement actif sur une base régulière, afin de réduire les facteurs de risque et les limitations fonctionnelles liés à l’affection de longue durée dont elle est atteinte ». Depuis 2017, les médecins traitants peuvent désormais prescrire une activité physique adaptée aux patients atteints d’Affection Longue Durée.

Dans le cadre de l’instruction Ministérielle qui a suivi le décret un Comité de Pilotage coordonné par la DRDJSCS et l’ARS PACA a défini 2 types d’offres qui seront recensées régionalement pour orienter les patients atteints de maladies chroniques :  

  • L’offre d’Activité Physique Adaptée Personnalisée (APAP) : Pratique d’activité physique adaptée à prétention thérapeutique, destinée spécifiquement à des malades chroniques, personnalisée en fonction de l’état de chaque personne, au sein d’un groupe restreint (env. 10 personnes).
  • Une activité Sport Santé Bien-Etre (SSBE) : Pratique d’activité physique à visée bien-être pouvant accueillir des personnes atteintes de maladies chroniques sans limitation fonctionnelle ou avec limitation minime, suffisamment autonomes pour s’adapter au niveau général d’un groupe.

Afin de rendre lisible ces offres auprès du grand public, des professionnels de santé et des structures relais, le recensement régional de ces offres va être effectué en PACA et un site internet dédié avec un outil cartographique sera mis en ligne en septembre.

 

 

Le réseau Agita, la dynamique sport santé des Alpes-Maritimes et du Var.

Impulsé en 2016 par Azur Sport Santé, il a pour vocation de fédérer autour de valeurs et d’une dynamique commune, l’ensemble des acteurs concernés par le sport santé : le grand public, les professionnels de santé, les patients, les élus des collectivités, les intervenants sportifs et APA, les responsables d’organismes de prévoyance.

Agita est inspiré d’un modèle de promotion territorial reconnu par l’Organisation Mondiale de la Santé : Il s’agit de l’initiative « Agita Sao Paulo »(9) menée avec succès dans l’état de Sao Paulo au Brésil.

L’objectif du réseau Agita PACA-est, est de dynamiser, dans une démarche collaborative proche du modèle des « communautés de pratique », le développement territorial du sport santé.

Les membres du réseau Agita se sont exprimés sur les problématiques liées au financement des offre d’APAP notamment. Azur Sport Santé a été ainsi missionné pour engager une réflexion sur le modèle économique de l’APAP. Un groupe de travail s’est donc créé avec des professionnels du sport, de la santé, de la prévention et de la prévoyance, ainsi que du monde mutualiste. Une première réunion s’est tenue le 10 févier 2017. Après avoir analysé un certain nombre de problématiques sur le financement actuel de l’APA, la commission s’est donné comme objectifs, dans un premier temps :

 

  • D’évaluer le coût moyen d’une offre d’APAP,
  • D’évaluer le « coût psychologique maximum » pour participer à à un programme APAP,
  • De lister les différentes aides qui existent pour diminuer le coût de l’offre APAP pour un pratiquant.

3- Le modèle économique de l’APAP

Les problématiques actuelles :

1 – Le coût moyen d’une offre d’APAP

D’après une enquête au sein du réseau Agita sur une quinzaine de structures proposant une offre APAP, le coût moyen d’un programme à l’année s’élève à 5 400€ soit environ 45€ / mois / personne pour un groupe de 10 personnes.  Ce coût varie selon :

  • La rémunération des intervenants APA. Les ressources humaines représentent en moyenne 75 % des dépenses pour le programme (4 050€). Ce coût varie selon l’expérience et la qualification des encadrants, mais également en fonction du temps dédié au suivi et à la coordination du programme notamment avec les professionnels de santé.
  • La durée et le nombre de séances. Selon l’échantillon sélectionné, 55% des programmes proposent des séances d’une heure trente, tandis 45 % proposent des séances d’une heure ; ceci 2 à 3 fois par semaine.
  • Du nombre de personnes encadrées. La plupart des structures interrogées accueillent entre 10 et 15 personnes pour leur programme APAP afin que la séance soit plus individualisée et adaptée à la maladie et à la condition physique du pratiquant.
  • La disponibilité des lieux de pratique. Certaines structures profitent gratuitement de la mise à disposition de salle par une collectivité locale, d’autres bénéficient d’un créneau de salle à un tarif réduit, tandis que certaines organisations louent un espace privé.
  • Le type de matériel utilisé selon l’activité proposée. Les structures proposant des programmes accueillant des personnes touchées par une maladie chronique peuvent investir dans du matériel spécifique comme des défibrillateurs portatifs.

Le financement d’un programme APAP dont le coût moyen se situe, dans un cadre associatif, aux alentours de 540 € par an et par personne peut sembler élevé. Il est rarement autofinancé à travers la seule cotisation du pratiquant. Néanmoins c’est également le cas pour les offres de type compétition ou loisir au sein des clubs sportifs. En effet, 76 % des associations sportives perçoivent un financement des communes(10). Sans le co-financement des collectivités, des autres partenaires et l’aide des bénévoles, le coût d’une offre compétition ou loisir est quasi équivalent à celui d’une offre APAP.

2- Le « coût psychologique » maximum d’une adhésion à un programme APAP :

Entre mars et juin 2017, plus de 200 personnes âgées de plus de 60 ans ont participé pendant 3 mois au programme d’APAP « Prévention Active Sénior » (PAS). A l’issue de ce programme, nous avons interrogé environ 80 personnes à travers la question suivante :

« Quel est le tarif que vous compteriez mettre pour pratiquer un programme d’APAP comme le propose l’action Préventive Action Sénior ? »

L’enquête a déduit que le coût psychologique maximum était d’environ 20€ par mois. Pour 90 % des répondants ce coût variait de plus ou moins 10 € par mois. Seules quelques personnes ne souhaitaient pas s’engager si ce type de programme n’était pas gratuit.  

Ces résultats sont à relativiser puisque les seniors sédentaires qui ont intégré gratuitement l’action PAS ont pu se rendre compte des bénéfices de la pratique d’une APA. Ils seraient ainsi plus à même d’investir dans l’adhésion à ce type d’offre. Néanmoins, après avoir suivi un programme pris en charge gratuitement pendant 3 mois, les bénéficiaires de cette action seraient prêts à payer le prix moyen d’une licence dans une association, soit entre 100 et 200€ par an. Or d’après notre enquête au sein du réseau Agita le prix moyen d’un programme APA s’élève à 540€ par personne et par an. Les structures doivent ainsi trouver d’autres sources de financement que les fonds liés aux adhésions.

Les différentes sources de financements et d’aides :

1- Pour les structures :

2- Pour le public :

Quelles mutuelles et assurances remboursent l’activité physique et sportive ?

Liste non exhaustive des assurances et des mutuelles recensées proposant des dispositifs d’aide à la pratique d’une activité physique ou sportive. 

*Sous réserve du type de forfait ou de garantie complémentaire contracté

Pour accéder aux pages web de chaque mutuelle, cliquez ici.

 

Les pistes d’optimisation du modèle économique de l’APA :

  • Dans un contexte où les services publics tendent vers le regroupement d’offres coordonnées et non segmentées comme pour l’Education Thérapeutique du Patient, favoriser le développement de financements pluriannuels des offres d’APAP.
  • Mutualiser les moyens, et notamment des ressources humaines avec un coach sur un territoire déterminé pour plusieurs structures.
  • Intégrer la réflexion de la tarification sociale dans le nouveau modèle économique.

 

 

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Annexes : étude de cas de différents modèles économiques existants 

Le modèle strasbourgeois :

  • Financement du dispositif sport santé sur ordonnance (~245 000€ / an) grâce à de multiples partenaires : via l’ARS dans le cadre d’un Contrat Local de Santé sur du pluriannuel, le Régime Local (assurance maladie) et le CNDS,
  • 70 % des bénéficiaires vivent sous le seuil de pauvreté, ils bénéficient ainsi d’une politique de tarification sociale (3 tranches selon quotient familial). Pour tous les pratiquants, la première année est gratuite ; les 2èmes et 3èmes années, le coût est soumis à la tarification sociale.

Le modèle Biarrot :

  • L’entretien d’évaluation du médecin avec son patient est payé au médecin 25 euros par Biarritz Sport Santé grâce au soutien du Chèque Santé® et du Groupe Pasteur Mutualité,
  • L’entretien du bénéficiaire avec l’éducateur médico-sportif de Biarritz Sport Santé est gratuit,
  • Une participation symbolique de 10 euros est demandée aux bénéficiaires du programme d’accueil de 12 semaines dans les clubs (gratuit pour les bénéficiaires de la CMU),
  • Le coût d’accueil dans les clubs est soutenu par Biarritz Sport Santé sur la base d’un forfait global de 50 euros, financé grâce aux soutiens du Chèque Santé® et du Groupe Pasteur Mutualité.

Le modèle As du Cœur :

  • Le programme est financé par les pratiquants (210€ pour 10 mois, 115 euros pour 5 mois), et grâce aux soutiens de Malakoff Médéric Innovation Santé et de l’ARS (à eux 2 pour 2/3 du coût de revient global du programme),
  • Les participants affiliés à la Caisse Déléguée pour la Sécurité Sociale des Travailleurs Indépendants (CDSSTI ex RSI) bénéficient également d’une réduction pour ce programme (75€ sur les 115 ou 210 €).

Le modèle de la SISA :

  • Convaincre les villes et ou les CCAS du Golfe de Saint-Tropez de mettre à disposition des ETAPS ou des intervenants diplômés pour encadrer des personnes sédentaires ou touchées par une maladie chronique 2 à 3 fois par semaine.
  • Sensibiliser les professionnels de santé sur le plan local, et assurer l’accompagnement la coordination et le suivi de la promotion de l’APA sur le territoire (subvention ARS).

A l’étranger :

  • En Afrique du Sud : l’assurance santé privée « Discovery Health » propose à ses adhérents le programme bien être « Vitality » qui aide leurs membres à augmenter leur niveau d’activité physique(11). Plus de 1,7 million de personnes sont inscrites à ce programme innovant qui permet à chaque bénéficiaire de diminuer le coût de son assurance santé en fonction de son engagement dans la pratique régulière d’une activité physique au sein de 3 chaînes nationales de salles de sport. Les bénéficiaires ont la possibilité de gagner des points en fonction de leur assiduité à la salle de sport. Ces points leurs permettent ainsi de réduire la souscription à leur assurance santé. Ce qui revient pour les plus assidus à économiser l’équivalent de 70 à 80 % de l’abonnement annuel à la salle de sport.
  • En Allemagne : La « prescription verte » est une ordonnance pour une thérapie non médicamenteuse : l’activité physique et sportive. Les patients peuvent être orientés vers des structures sécurisées et adaptées, ainsi que labellisées « Pro Sport Santé ». En participant à ces types de programmes labellisés, les allemands peuvent se faire rembourser par leur assurance ou leur mutuelle, une partie des frais d’inscription.  Tandis que les structures « Pro Sport Santé » reçoivent des subventions de l’assurance maladie(12)

Référence annexes :

  1. Kohl HW, Craig CL, Lambert EV, et al. The pandemic of physical inactivity: global action for public health. Lancet Lond Engl. 2012;380(9838):294-305. doi:10.1016/S0140-6736(12)60898-8.
  2. https://www.insee.fr/fr/statistiques/2569380?sommaire=2587886#consulter
  3. https://www.data.gouv.fr/fr/datasets/personnes-en-affection-de-longue-duree-ald/
  4. http://www.sirsepaca.org/sirseterritoires/sirseterritoires_Regions.php
  5. Aquatias, S., Arnal, J. F., Rivière, D., Bilard, J., Callède, J. P., Casillas, J. M., … & Duché, P. (2008). Activité physique : Contextes et effets sur la santé. INSERM.
  6. CNAPS (2007), L’exercice contre les maladies liées à la sédentarité, Conseil National des Activités Physiques et Sportives.
  7. http://www.sports.gouv.fr/autres/RapportIGASIGJSAPSMArs2018.pdf
  8. https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2016/12/30/2016-1990/jo/texte
  9. http://www.portalagita.org.br/en/agita-mundo/the-agita-mundo/who-we-are.html
  10. http://www.sports.gouv.fr/IMG/archives/pdf/STAT-Info_n_06-05_avril_2006_-_Le_budget_des_associations_sportives.pdf
  11. https://www.discovery.co.za/vitality/how-vitality-works
  12. https://sgsm.ch/fileadmin/user_upload/Zeitschrift/62-2014-2/02-2014_6_F%C3%BCzeki.pdf